La Reine-Soleil


Envahisseuse et pénétrée comme Mai,
Translucide et lustrée comme Juin,
Belle de figure comme l'Orée du Triomphe,
la Reine-Soleil naît au Carrefour Fulgurant
des Couleurs de l'Ecume des Contraires,
entre le haut de sa tête
comme un firmament criblé de fers à cheval,
et le Milieu de son Corps
comme un Pont Immergé dans les Eaux Vénérables,
en amont du col des cygnes,
aux frontières du Fleuve et de l'Océan,
au Sommet de la Colonne Vertébrale de la Liberté,
au Commencement des Lignes Courbes de l'Amour!

Respirant en un point indéterminé d'elle-même,
semblable à la Grande Fougère Vénérée,
elle réunifie le Monde en l'identifiant à elle,
le noyant dans la Mousse et le Velours sans fin
de son souffle Unanime,
faisant fuir le Désert
devant ses Légions de Forêts Immortelles,
l'extrayant de ce Monde,
le rejetant dans les Espaces du Néant!

Se tenant sur le Pont de l'Arc-en-Ciel
qui relie sa gorge à sa cheville,
elle se mire dans ses nerfs
comme des Rivières et des Ruisseaux de l'Air
et se balance musicalement entre ses épaules chanteuses
qui se rapprochent l'une de l'autre
comme deux Îles de l'Ascension à la dérive!

Arbre Parfait de Vera Cruz
dont le modelage correspond à chacun de mes battements,
ô mon Arbre de Coeur achevé,
Arbre-Cadence de l'Elégance,
Arbre porteur de la Couronne de pain de chaque jour,
Pure Volonté de porter soi-même
son propre poids de Volupté,
Sein rebondi de la Gorgone
comme un saut perpétuel dans le Vide,
Cor de chasse du Désir qui luit en permanence
au fond de moi,
Bête figée en mon horizon
comme un Immense Palais,
ô Porte Cardinale de ma Ville à jamais Retrouvée!

Tu es mon Impondérable Vérité,
ma Volonté de Conscience,
ma faim d'enfantement obéissant
à ta propre Soif d'enfantement!

Sublime Galante,
Plus haute que Lumineuse,
ô Enrouleuse Rouée,
Pétrie de Tours de Ruses!
Quand, par-delà les Espérances
et les désespoirs actuels,
sonnera l'Heure de Gravité,
l'Heure Personnelle de tous,
alors, comme sur une Oriflamme Redéployée
à la face du Siècle Finissant,
réapparaîtront tes Couleurs Eternelles:
Le Noir, couleur de la Terre Ferme,
Principe Premier de la structure,
Essence de la Puissance,
Source Royale
de la Volupté!
Le Blanc, Couleur de ton Passage
comme un Nuage Ondulant dans le ciel des hommes,
et de ta Chute dans leur chair,
Principe de l'Echo,
Fleur-Maxime de la Rencontre Inespérée!
Le Bleu, Couleur de tes Rues Mouvantes du Salut,
Valseuses baignées d'ombre,
parfumées de pierre,
Déluge de Futur!
Le Vert, Couleur de ta Présence Immédiate,
faite d'Eau Nombreuse en profondeur,
de Vent Constant et de Massifs de Plumes,
Principe de l'Immanence!
Le Rouge Carmin, Couleur de ton point d'avance
extrême dans les Arcanes du Plaisir,
et de ta Vraie Représentation dans l'Esprit,
Principe de tes Sciences Innommables!

L'Or, Couleur de ton Être différencié et multiplié,
Feu de Principes!


LE SACRIFICE DU SOLEIL

ACHEVE D’IMPRIMER
EN JUIN 1979
SUR LES PRESSES DU CASTELLUM
8, RUE DE BERNE A NIMES.
EDITIONS SAINT-GERMAIN-DES-PRES
110, RUE DU CHERCHE-MIDI-75006-PARIS.