Le Calice D'Amour Fin


Une Rue Grave
Violente comme une Veine De Sang,
à la Beauté intransigeante,
à la Valeur Implacable,
ralliée à une Cause puissante et Volontaire,
Présente immédiatement,
déshabillée, nue,
Donnée, Ouverte, Commune,
librement courue par les Forces
Consacrées et Sanctifiées,
partie directement d'un Pôle
désespérément lointain,
et, cependant, Visible,
Souveraine et Foudroyante,
de par elle-même Principe d'Organisation
et de Vertébration Elaborées de la Matière,
frémissante de Raisin de Septembre,
ivre de Sel Béni,
peinte cérémonieusement
en Blanc et Noir Parfaits,
sans cesse me conduit
dans une Fête Insupportable de dragées de noces
et de pigeons lancée en Pure Perte
de la Terre comme une Ecume de Vie,
à l'Endroit Profond et Dominateur
où siège le Bleu Lotus
de nos Vallées de la Dissipation,
le Palmier Mouvant et Eternel
sur qui pivote l'Ardeur
Conjuguée des Corps Compénétrés
le Vase d'Offrande Vivante
à l'Anse de Topaze Multiple
où longuement transite notre Idéal Jaune Eclatant,
la Plus Infime Cible de nos Désirs,
Ronde et Enfouie comme une Horloge de Chair
Aimée et Douloureuse!

Là, par des Champs Immenses,
à mille lieues de toute Pensée Présente,
entre une Musique de Contreforts
et un Contrepoint de Cimes de Monts,
des Licteurs d'Afrique soulèvent,
dans leurs têtes solides,
des Lourdes Résonances Romaines
apportées par les grandes Ombres Equestres
du Temps qui passent fugacement,
à l'heure de Midi,
Emplies des Paroles des hommes Morts
et à Venir!

Jusqu'à ce que dans l'Etendue Inentravée de l'air
Enjambée par les seuls dieux de la Victoire
Apparaisse le Signe de Croix Approbateur,
ne désignant nommément aucune religion,
mais divisant le Ciel
en un Ciel Pacifique, un Ciel du Nord
Louangeur et Glorificateur,
Ciel de Porteurs de Torches et de Blasons,
et un Ciel du Sud Guerrier,
Ciel de Tribuns Militaires
Manieurs du Glaive de la Défense
et du Couteau de la Contre-attaque!

L'ordre est alors donné par les Magistrats
de sonner le Début d'un Tournoi-Feu
Inouï de Voûtes, de Taureaux et de Cavales,
qui toute la Nuit durant
Illuminera sans Vergogne
des Jeux Occultes de seins, de lèvres,
de bijoux et d'yeux,
des Jets Royaux de Vierges et d'Eléphants,
les Nappes de batiste de nos Repas Immémoriaux,
et Offrira à l'Eternité Aveugle
les Eaux des Ports de Fleuve et de Mer,
où, comme des Grandioses Colonnes
de Lustres Vénitiens,
se sont enracinés les Formes et le Coeur de Pourpre
Tragique des reines de nos Cours Défuntes!

Car le Destin n'est qu'un Téméraire
Pont de Fumée,
Rougi par les Derniers Rayons du Soleil Couchant,
et qui s'en va
dans un Ciel momentanément Uni d'Impératrice!


LE SACRIFICE DU SOLEIL

ACHEVE D’IMPRIMER
EN JUIN 1979
SUR LES PRESSES DU CASTELLUM
8, RUE DE BERNE A NIMES.
EDITIONS SAINT-GERMAIN-DES-PRES
110, RUE DU CHERCHE-MIDI-75006-PARIS.