Ode À Dionysos-Roi
Flamme des Flammes,
Mystère des Mystères,
Séduction des Séductions
Gaîté des Gaîtés,
Rumeur des Rumeurs,
Amour des Amours!
Dionysos le dieu, le vieux, le jeune,
le bruyant, le saint taureau
qui toujours, aux dires des anciens,
au-delà des citées, par-delà les Ans,
jaillira de la mer des lyres
répandue aux bords des forêts furieuses,
Dionysos le pur, le saint lotus
gisant sur la voie éblouissante,
au continent du sang,
de par le monde habité,
le droit, le vertical,
le saint lys de miroirs bleus,
Pylône de l'existence,
Dionysos le magnifique
le saint oiseau de mer disparu,
le vaste aigle mort,
le grand dieu perdu,
nous invite, nous appelle et nous prépare
à un chant archaïque et nouveau,
étrange et beau
comme l'huile neuve, comme le vin nouveau!
Que sans espoir certain,
avec audace folle
et le geste imposant et sonore,
comme la sainte nature,
imposante et sonore,
il soit à nouveau acclamé,
ce Défunt, cet Immortel!
Au-delà des Cités, par-delà les Ans,
Lui, le Défunt,
Lui, l'Immortel!
Lui, le Premier Célébrant,
Lui, le Premier Célébré!
Lui, l'Oublié Immense,
Lui, l'Infini Inoubliable!
Lui, l'Ambre,
Lui, le Bronze,
Lui, l'Or!
Lui, enfin, notre tyrannique liberté!
Vive Lui, vive Lui, vive Lui,
trois mille fois!
Vive l'Ambre, vive le Bronze, vive l'Or!
En avant pour une Pluie d'Odes limpides!
Commençons le dithyrambique voyage!
Entraînés par le dieu lunatique,
tirons selon un rythme sensuel et frénétique
les fils arachnéens de la mer sans limite,
et sur la face lisse de l'onde
naviguons vers la Colchide
de l'Apothéose,
future monarchie du Seigneur Dionysos,
Gardien de l'universel or!
Salut, ô toi, le Buveur de Ciel,
Le Confiseur du Soleil,
le Très Libéral,
Le Souverain Potier de la Grande Bénie,
de la Toute-Belle, de la Toute-Adornée,
de la Chair Bien-Aimée,
d'entre les bien-aimées,
de par la douceur inouïe
de ton feu bienvenu!
Salut au Trop Digne Poète
du corps humain mirifique,
varié et plastique!
Salut au Très Haut Aède
et aérien cithariste
des corps très gracieux,
roulés côte à côte
dans la lumière des aromates
ainsi que des bougies joyeuses,
portés par leurs haleines heureuses
comme sur des lits de zéphyr,
très divers et multiples,
comme les anneaux déroulés du chant âcre
des fumées d'Orient,
comme les pétales enchantés
de la Rose des nuits,
comme les formes perdues
des jardins de Bengaze bien dits,
et, celles, fuyeuses,
des terrasses de cannelle d'Abyssinie,
comme le parler innombrable
des rossignols très colorés,
semblable à une danse volante
de pierres turquoises
s'entrecroisant vers l'est, vers l'ouest,
vers le sud, vers le nord,
et s'inondant les unes les autres
ainsi que des très longs baisers,
comme des pavillonnantes lignes
des vernales ondées,
comme le désir violent, sans cesse se récréant,
des péninsules de nues,
et le buste changeant des terres en dérive
palpitant dans leur âme érotique,
comme les sourires bienheureux de l'ivoire
et les rires enamourés de la nacre,
comme l'éclat variable
de la neige au printemps
et les intonations d'argent, de platine,
de cristal de montagne
et de torrent d'étoiles sonnantes
des nymphes-sirènes aux beaux seins,
comme les nuances de la peau des poissons
et des téméraires volumes de plumes,
comme, enfin, le toucher très divers
et sublime
des fruits d'Arménie, d'Arabie et de Perse,
chéris des dieux!
Ô émail bleu de la jeunesse,
très suave cithare de nos corps,
trop bons, trop beaux, trop aimés,
fleur de toutes les cithares,
noble Géniteur d'Eros!
Jamais on ne dira assez
ta légèreté d'azur égyptien,
bleue fille de ta céleste origine
et de ta naissance crétoise,
ni ta transparence indienne,
fruit naturel de ton Egéenne Equité
où Ionienne Elégance et Eolienne Beauté
boivent avidement,
portées, majestueuses galères,
par la Paix Asiate
que Lydienne Cruauté et Phrygienne Manie,
terribles voisines,
composent ensemble
avec l'Universelle Harmonie
en la plus éthérée
des abondances vaporeuses!
Ô réserve aurorale et punique,
ô virginité éthiopienne,
ô libanienne suavité!
Ô musique des flottes de mer
gonflées de lait céleste,
ô hospitalité de la Splendeur!
Ecume de la Terre Grande,
Gloire invaincue des Deux Sexes
pour toi épanouis,
immortelle Liberté des parfums
aveuglants d'intensité,
Inentamable Profondeur de l'Orient,
toi qui donnas le sceptre à Cybèle,
la Toute-Bonne,
le globe à Aphrodite,
la Triple Bénie,
et l'inassouvable désir à Adonis,
le Grand Ivre,
toi qui es la mesure
de la puissance immesurée d'Ariane,
Flèche et balle des jardins chaldéens
et achéménidiques,
Verbe d'Iacchus,
Ronde Perfection de Bacchus,
Volonté de Dionysos!
Le Roi Dionysos est mort,
vive Dionysos-Roi!
Mort pour toujours,
qu'il vive à jamais!
Aux gymnases sans bornes de l'Enthousiasme,
aux stades inentravés de l'émerveillement,
aux théâtres infinis de la gratitude,
délire de jeux, manie chasseresse,
tempête de courses pédestres,
concours de prodiges de palestre,
montés comme des gerbes de blé
sur des chevaux de vent
plus frais que des voiles blanches
accomplies en mer vivace,
courons et fêtons,
montons et célébrons,
amants échevelés,
aimés aux beaux cheveux,
célébrons le Roi-Principe!
Vive le Bouc,
vive le Bouc-Roi!
Vive le Roi-Œillet,
vive le Dithyrambe!
Vive le Roi-Juge,
vive le Roi-Lys!
Vive Minos,
vive Rhadamanthe!
Vive le Lotus-Roi,
vive le Roi-Lotus!
Vive l'Invincible,
vive l'Invaincu!
Vive le Grand Venant,
vive le Grand Venu!
Vive la Nef Inspirée
sur la grande mer vierge
arrivée!
Vive le Matutinal
qui, venant des Eaux,
salutaire il marche sur la ville,
entouré des nouvelles constellations!
Vive le Stratège,
vive l'Extravagant,
vive l'Amant,
vive le Myste!
À nous les amants,
à nous les mystes,
à vous les poursuivants,
à vous les sublimes toréants
et acrobates semi-divins,
à nous les sacrifiants,
les dévorants,
les adorants!
Nous t'acclamons,
Dionysos!
Nous te sacrons,
Ariane!
Gloire à Dionysos,
Gloire à Ariane!
Tourbillon de minotaures
dans les airs!
Et toi, poussière de couchants,
qui nous donnes le vertige du sacrifice
et nous guides au final Amour,
sois bénie!
Arc de pléiades,
fontaine aux galaxies,
laurier-rose d'astres
au centre de la foule immaculée
des rêves éternels,
nourris du sacrifice de la Mère,
qu'il sourde le Brillant
au visage de raisin,
Festin de rouges oeillets,
bûcher d'épis de froment,
oiseau de lave,
qu'il s'envole le Blond Incendiaire
qui règne déjà,
Thyrse incendié de champs lumineux!
En cette dionysie générale
où le Principe est Roi,
et le Roi Principe,
promesse de moisson et moisson promise,
par nos flûte claires
comme le pur Soleil,
en notre Seigneur Dionysos,
Notre Double Soleil,
cherchons, trouvons, nommons
et louons
le mât de l'Ida,
l'axe de la Crète,
la grande outre de l'Egée,
l'espoir de l'archipel,
la colonne de la Piérie
le frontal saphir de l'Hellade,
la sainte abeille de l'avide Lydie,
l'ange des baies d'Italie,
l'archange de Naxos,
le divin Rôdeur des Cyclades candides,
le rossignol de l'Ionie,
la cigale de l'Achaïe,
la pierre de l'Attique,
l'occulte lierre d'Athènes,
le laurier de la Béotie,
la trompette de l'Eolie,
la foudre de la Macédoine,
l'asphodèle de Cyrène,
la topaze des Syries,
l'aura des Arabies,
la couronne d'Alexandrie,
l'indissoluble météore de Béryte,
le tournesol de la mer impériale,
le rempart d'Urartu,
l'immortelle merveille des Indes,
le cratère de l'Asie,
le calice de la Science,
l'Aetna de la Connaissance,
le suc de l'Intelligence!
Pardonne,dieu, l'homme qui t'a à mort haï,
la femme qui t'a pour toujours fui,
pardonne, ô toi qui n'as jamais pardonné,
ô roi délaissé, ô roi terrible,
très enjoué danseur et inépuisé courtiseur,
habile maître de vengeance
tout-puissant,
puits de l'honneur,
racine de la joie,
fleuve de jouvence,
Granicus d'arcs-en-ciel,
Euphrate d'or!
Ecoute, prince des passions,
les plaintes douloureuses comme des bouillants Hèbres
de lamentations,
exauce, prince de la compassion,
les appels,
touchants comme les golfes béants des océans,
émouvants comme les énormes bannières
avec langueur se déployant,
de la Phorminx d'Eros,
Restaure le poignant Adonis
sur le trône,
pareil à un Anti-Liban d'hyacinthes,
des Admirations!
Relève de l'Erèbe de l'intolérable défaite
l'Aphrodite muette,
ramène à Ephèse la pure
Artémis, la très grande bannie,
retrouve
retrouve et pacifie Ariane en peine,
ton unique auréole de rouges flammes,
ô guerrier pacificateur,
destructeur du doute tentateur,
ô Tigre d'améthystes!
Viens, tonitruant,
clamant airain de la maturité,
hache de l'Action virile,
acier de la vie!
Viens comme un nuage galopant
de taureaux d'ouragan
réveiller les esseulés de la vallée,
tambour du sang de l'amour,
chaleur de nos vallons,
mêlée de nos bois,
ô Taureau béni,
réjouissance de nos plaines
avec le Ciel confondues,
Couteau qui brise la désunion,
Etalon d'éclairs
qui transgresse la solitude,
Taureau de l'omnipotence
aux cornes d'Unité,
ô maître des naissances très clément,
très délicieux,
barque de canaris
glissant parmi les ombres des voluptés,
le long des couloirs d'ambre gris,
ô dieu très ancien et très savant,
et très enfantin chanteur
d'hyménées!
Renouvelle l'Amour,
très cher dieu, spirituel et lumineux,
très courtois Seigneur des boissons exquises,
très affectueux Prince
des danseurs-nés!
Apporte ainsi qu'une invisible danse
sur des flots libyens et dorés
l'heure de l'hymen inespéré,
toi qui es la souche de l'innocence,
l'humus de la bienveillance
et le marais de la tendresse,
dieu du silence ondoyant,
dieu souple du silence berçant!
Verse, ô bel artiste et très doux convive,
verse le breuvage indien
dans nos coupes atticiennes,
prodigue-nous, maître des unions,
tisseur très prolixe de paradis,
prodigue-nous des baumes aphrodisiens
et vénusiaques,
toi qui es le fer et la lance
et la javeline intrépide
et la boule de feu véloce
et le bélier irrésistible
du désir fondamental,
toi qui es le Soleil Africain
de la convoitise du corps
enfouie sous l'amas infécond
des siècles distrayants,
et conservée intacte de par toi,
l'annonciateur de sagesse,
qui es l'esprit de l'orage,
la raison de la colère,
la fin de la véhémence,
la lumière de la violence,
la lucidité de l'amertume extrême,
l'inconsolable grandeur de la déception,
la force de la douleur tenace,
le vin clair de la désespérance,
le lac noir de la révolte,
ô Prince trop aimé,
comète de la pensée,
toi qui donnas le divin aimant à nos lèvres
pour divinement renaître,
l'éclatant javelot à nos sourcils
pour fulgurer dans les bien-aimées,
les filles bien-adorées,
la couleur audacieuse à nos grandes prunelles,
rouges et noires,
pour chanter notre vivante image,
mauve et violette,
et le poignard d'amour
à nos yeux mortels
pour t'en rendre multiple grâce,
ô pupille des chênes
et pupille de la justice,
cil des figuiers de Barbarie,
paupière des platanes,
Regard des arbres
qui jusqu'à Toi croissent!
Ô Dionysos, Trésor de ta Mère,
coffret précieux
bistré de larmes maternelles,
Salut à toi quinze mille fois,
salut à Dionysos, la Myrrhe des femmes,
l'Encens subtil des amantes,
le lait des bacchantes,
le nuptial anneau des courtisanes,
l'anémone des folles,
le trophée inestimable des fauves bergères,
la délivrance des prêtresses barbares,
la complétude des Reines,
la scintillante ceinture des jeunes filles
qui en ton chant d'oiseau inaugural
ineffablement espèrent,
la parure de myrtes des épousées
que de l'océan de laque des ongles
de leurs pieds menus
à l'ardent Bengale
de leur printanière chevelure,
les imperceptibles dons
ont comblé supérieurement,
ô dieu très galant et très savant,
très affable prince aimant,
très aimable exotique enfant,
Premier Danseur du ballet miséricordieux
de la galante sagesse,
Incantateur en chef
de l'incarnate ronde du gai savoir,
Prophète écarlate
de la gracieuseté des êtres,
le plus fasciné
des sages fascinants!
Ô Vigne de la vie,
sel des jours bénis,
développement du coeur des humains,
enchantement des yeux de la Lune,
songe murmuré des navires,
bouche des vents,
front des houles,
Tête de l'homme,
Fenêtre de la femme,
stupéfaction des roses,
humiliation des diamants,
victoire des rubis,
soleil de la piété des lions,
pluie de la lumière des léopards,
oasis de la soumission des panthères,
paix des damalisques,
bain de l'amitié des guépards,
effusion de la voie lactée,
résine de l'air,
aiguillon du matin,
mastic du midi,
vin doux du crépuscule,
musc du soir,
ambroisie de minuit,
miel luxueux de la nuit,
nectar de l'aube,
essence des cerises,
âme de la menthe,
trouble des dahlias,
égarement des villes basses,
agenouillement des iris,
prosternation des jacinthes,
perdition des violettes,
hymne chaud de la brise,
ode nocturne de la mer ionienne,
fortune des jasmins,
baume des versants,
quiétude des grèves,
adoration des perles,
ô toi qui fais gémir les rues
d'Amour
comme des ânes fleuris,
ô toi qui fais chanter les amandes,
et résonner les figues,
ô toi qui fais crier les cailloux de force
et le sable d'extase!
Ô toi le Maître, le Parfait,
le Doré,
le Floral Alabastrin,
le Marmoréen, le Nyséen,
le Serein, le Langoureux,
le Léonin, le Faunesque,
le Léopardesque,
le prince levantin
marié par cent smaragdines bagues
d'amour
à la belle lumière aux mille plis,
le plus simple des dieux nus,
le roi adolescent
des chevreaux qui gambadent sur la colline,
le roi nouveau-né des faons,
le vieux pasteur
des boucs d'océan,
le pèlerin de lui-même,
paré de mouettes,
brodé de planètes!
Que des temples de papillons
rapidement s'envolent vers toi,
ornés de clochetons de scarabées,
drapés de galeries de libellules,
armés d'escaliers de guêpes,
surchargés d'hypostyles
d'oiseaux-mouches!
Que des vitraux d'abeilles ouvrières
soient posés aux ouvertures
pour que tu puisses t'écouter,
ô Bruyant,
dont la dentelle des Sons
tamise à peine la Voix!
Que l'on assemble par les plus fous
des artisans
des mosaïques d'yeux
dont chacun fêtera
l'un de tes Noms sans nombre!
Que des plafonds circéens soient préparés,
pavés de lèvres de déesses,
pour honorer ton Désir!
Que l'on établisse des balcons proéminents
de vin de Chypre
pour qu'à ton réveil
tu puisses saluer la mer d'Aphrodite!
Que l'on invente des baldaquins
de flûtes obliques
et des lits aux draps de nénuphars
pour que tu puisses Aimer,
Seigneur Tout-Galant!
Et que de tous les domaines
des coupoles se lèvent
faites de pintades étoilées
et des dômes aux outardes
pour que, rassasié,
tu puisses jouer avec les paons,
voler avec les cygnes,
folâtrer avec les aigrettes
et danser avec les antilopes,
toi, dont les plumes
sont des orangers en fleur,
ô abricotier du paradis,
Pommier dont chaque Pomme
est une Babylonie!
Ô Bacchants, et vous tous,
paisibles bateliers des Îles Révélées
qui avancez sur les traces de l'Enchanteur,
entre nous, bacchants, bénis d'entre les hommes,
et le dieu le plus adoré
de tous les dieux qui furent
jetons un Pont
de mille fois dix mille trières
à tête porcine
de mille fois dix mille chrysolithes
suspendu,
et bâtissons-y le Temple-Soleil
comme un tapis figurant
les caresses des dieux,
à l'image de la Harpe Trismégiste,
sous-marine et hypercéleste
de la Pélagie première!
Par une harmonique inouïe,
par une inaudible musique
construisons un temple palatinal
d'une féminité croissante,
semblable à un Serpent
qui danserait à perte de vue!
Donnons-lui une incompréhensible hauteur,
et plions pour lui
sous le poids de notre riche mémoire
un art d'une beauté insoutenable
que nous pétrirons au gré des lois
du dieu génial!
Elevons-le comme notre plus haute
Orgie,
sur une énorme Lampe tourneuse
de floralies vermeilles,
et, ainsi achevé,
lâchons-le vers le ciel éternel,
comme une ambassade de bacchants
au Grand Roi,
comme une Prytanie de Corybantes,
comme un Grand Ecclésia
de Satyres de pourpre,
comme un Tribunal Suprême
de Trityres de satin,
comme une Grande Cour
de Silènes de soieries!
Offrons- le comme une assourdissante
hécatombe
de glaïeuls en délire
au Démon des oeillets
jaunes, blancs et rouges,
au Maître de la Neige,
notre Gratificateur en chef,
l'Aimé des citronniers,
le Seigneur de la Dame de l'Eté,
le Possesseur des palais du Monde,
l'Hôte de tous les ports,
le Jouisseur de toutes les nourritures!
Que l'Ode-Pyramide
s'évente dans l'azur,
Jour parmi les Jours,
comme un brasier de monnaie d'argent,
comme une colonne d'eau de neige,
comme un chant de volière
de planètes éloignées!
Qu'en son autel principal
il couve
le Portique de la Royauté,
le Centre de la Rigueur,
l'Oeil de la Puissance,
le Nombril de la Douceur!
Que sa façade s'ouvre pour nous
comme le ventre d'une belle déesse
où, réservoir aux coraux,
nous voyons la Roue des Couleurs,
la balançoire des émotions,
la respiration des nations,
la crédence des sens bénie,
la gorge de la Bonne Montagne,
le giron du crépuscule,
la courbe irremplaçable
de la Nostalgie,
la baie parfaite du Retour,
le rire de la naissance,
la Grande Île
des Ruisseaux de l'Aube!
Bienvenue à Dionysos,
le roi d'hommes et de cygnes,
le brûlant Iacchus,
le dansant Bacchus!
Bienvenue au Tribun des Vagues,
à l'Emule des Palmes!
Bienvenue à Toi,
l'Exarque des Eaux,
le Triérarque des Continents,
le Conducteur des Tropiques,
le Coryphée du corybantique choeur
des Horizons!
Bienvenue au Rhapsode Suprême
de la Danse des Sphères,
le Saint-Athlète
de la Joute des Soleils,
le Héros Unique!
Alerte aux cymbales,
alarme aux crotales,
appel aux torches,
crépitement d'armes,
danse d'ânes, de boeufs et de taureaux,
élancement de femmes
hors des couches conjugales,
haut-le-coeur de génisses,
blond galop de la poussière danseuse,
sursaut des points cardinaux,
il Arrive,
l'Oint du Printemps,
le Baptisé des Arbres!
Du bas de la ville
au sommet de la montagne
allumez le feu des bachiques chansons,
cavaliers dionysiens,
blancs prêtres de Syrie!
Car il Vient,
le Christ Levant,
l'Osiris Déclinant,
l'Adonis Zénithal!
Porté par un taureau amoureux,
il est Venu,
le nourrisson des nymphes,
le fils du santal,
le trésor du zéphyr!
Jamais Prince ne fut acclamé
comme Lui!
Car il est venu,
l'Acclamé des Noirs,
le Roi des Asies de colombes
le Stratège des Phénicies d'aromates,
le Prince des Peupliers blancs,
le Vénéré de tous les Azurs,
le Roi Très Solaire de la Crète
aux cent souffles,
le dionysiaque Zeus,
Zeus-Dionysos,
le Danseur-Roi!
ODE A DIONYSOS-ROI
ACHEVE D’IMPRIMER EN MAI 1982