À Une Métisse


Je rêve à l'ombre
de cette frange de tes cheveux
pareille à une source
où tu te baignerais
comme une nue dans l'azur
ou à des feuilles d'oranger
que tu éparpillerais sur le sol
du patio de ta blanche maison,
à Malaga, cette Fille
de la Mer et du Vent,
Petite-fille des prunelles
de Tanit
et Soeur de Mari!

Car tu es brune
comme un cyprès
et ton nez
est un torrent des Pyrénées!

Ton front est lumineux
comme un épis de maïs
cuisant sur la braise
de ton coeur
et c'est là que commence ta vie
pareille à une fleur de blé!

Tes yeux
ont la gravité
d'un campanile de San-Cristobal
et ta joue
est un corps
d'église mexicaine!

Ta bouche
a l'impertinence de Carmen
et le classicisme de Dolorès!

Dans ta chevelure
pareille à un gave bigourdan
se cache la Pasionaria
de l'humble logis
de mon imagination garcilasienne!

C'est que je suis
un chevalier d'Espagne
grimpant avec son cheval
sur les moulins à vent
des Rois fanatiques
avec à la ceinture
la Rose autrefois donnée
par Dulcinée,
du temps où je naissais à l'Amour
dans Tomboso
la Brûlée du Soleil!


Et comme Antonio Vieira
je me mets
sous la protection
de ton torse métis
ô Celtibère,
ô Maure,
ô Indienne!


NUIT DE LICORNES

RECUEIL INEDIT