À la Bien-Aimée des Anges


Ô toute gracieuse Bien-Aimée,
au milieu du double mont de ta hanche,
de par la raie somptueuse
qui livre l'accès de la rose immortelle
de ta vulve sainte,
je m'élève jusqu'à la contemplation
de la verte Tempé de ton pelvis,
couronnée de la forêt embaumée
de ton sombre pubis!


Les Bien-Aimées meurent-elles jamais?
Comment mourraient-elles,
puisque elles allument
la torche de la vie
à la flamme inextinguible
du flambeau qui brûle
jour et nuit
sur l'autel de leur amour?


Elles ressemblent plutôt
à ces oiseaux fabuleux,
à ces grands oiseaux de Phénicie
qui renaissent de leurs cendres
en se rebaptisant dans la fontaine
de leur jeunesse première!


Et quand même les Bien-Aimées
seraient mortelles,
elles vivent si brillamment,
si splendidement,
si fulguramment
que leur trace ne s'efface guère
de la mémoire des grandes nations,
à l'instar d'Ariane la Crétoise
dont la nuptiale couronne,
offerte par son époux Bacchos,
monta au ciel
où elle est devenue
une constellation à l'éclat éblouissant!


Prosterné sur le tapis de prière
de tes cuisses veloutées,
je pointerai mon arc d'or
à la corde ivre
et aux flèches de miel,
vers ton ventre,
siège de ton doux ombilic!


Et je pénétrerai dans le jardon mystique
de tes entrailles
où, autour du bassin natal,
matrie de tous les humains,
se prélassent les paons multicolores
et chantent les flûtes du vent,
accompagnées des trompettes de la victoire
qui ont donné naissance
au Seigneur des êtres!


Que tu t'appelles Arsinoé,
Bérénice ou Cléopâtre,
mes odes ne célébreront pas moins
le serpent charmé
qui danse autour de ta taille
et qui par son mouvement circulaire
fait que tes fesses se balancent
comme les cloches de bronze
de l'église de l'Annonciation
aux Vêpres,
appelant les fidèles
à la prière du soir!


Or quand tes cloches
se mettent à sonner,
je me signe
et je pleure
te souhaitant de tout mon coeur
réchauffé par ton carillon
une longue vie passionnée,
semée de roses!


Ô Madone de Michel-Ange,
métamorphose-moi,
si tel est ton désir,
en une de ces roses
et, en échange, je te donnerai
mon corps modeste
et je te consacrerai
toute mon âme fière!


LES PORTES DE LA LUNE

RECUEIL INEDIT. OCTOBRE 2005