Hommage À Dionysos


J'aime à te voir allongée sur le sofa,
les jambes pliées
et ta belle croupe arrondie,
pareille à la pomme
offerte par Eve
dans l'Eden ivre,
ou à la grenade défendue de l'enfer,
convoitée par Proserpine,
ou à un figuier
dont je mangerais les figues
dans l'été portugais,
ou, enfin, à un amandier en fleur
qui innocemment reposerait
des frimas meurtriers de Février!

Alors,des baisers perdus
partent spontanément de ma bouche,
adressés à ta vulve calme
comme la baie de Syracuse
au mois de Juillet,
ou comme l'Egée en été,
quand les vents froids de nord-est
ne soufflent pas,
ou comme le mer de Madagascar
à la saison de la paix!


Et de te jalouser
d'être la Bien-Aimée de Bacchus,
le pampre préféré de Dionysos,
le lierre sacré d'Iacchus,
la vigne sauvage de Liber,
la liane des tropiques!

Et de t'imaginer
être ma propre Bien-Aimée,
mon raisin préféré
de par ton sein aux bouts vermeils,
mon lierre aimé,
me ceignant la taille
comme si j'étais la cathédrale de Paris,
ma propre vigne sauvage
de par ma tête,
qui est ma boîte à rêves éveillés,
ma liane m'embrassant
comme si j'étais un cocotier des Caraïbes!

Ô Toi dont je baise
le sucre de la bouche,
fais pleuvoir ton délire
sur mes yeux en larmes,
arrose-moi de tes lèvres en extase
comme en un bain
dans la fontaine des Quatre Dauphins
à Aix, la Législatrice latine,
comme en un signe d'amour
venant de la reine
Clémence Isaure de Toulouse,
bienfaitrice des troubadours
d'Occitanie
et, au-delà des monts,
des trouvères de France,
et, par-delà les mers,
des ménestrels du monde entier!

Ô Bacchante dont le thyrse est
mon sexe, couronné d'une pomme de pin,
et qui fait gonfler ton clitoris,
te pénétrant à travers ta profondeur
où se déploie l'Être
sous la forme de ton utérus,
jadis adoré
dans toutes les cavernes de la terre
où en des temps fort reculés,
on rendait un culte à la déesse-mère,
génitrice du devenir
dont la joie chanta,
avec des accents immortels,
Nietzsche, mon père allemand,
sans qui ma naissance
n'eût pas été possible!


SAVANES DE ZEBRES

EDITIONS ENCRES VIVES. NOVEMBRE 1999