La Dévote d'Adonis
Ô maîtresse toute entière
vouée à Aphrodite,
ô amante corps et âme dévouée à Adonis,
comme tes aisselles
embaument la menthe poivrée!
Et comme ta croupe,
aisée et facile
ainsi qu'un pain de froment
frais émoulu du four
ou comme une vigne mûre pour la vendange,
est baignée de myrrhe,
tant que j'ai l'haleine coupée
comme si je plongeais dans une glycine!
Oui, je te l'avoue,
ô douce amie de mon coeur,
je voudrais me coucher
dans ton nid d'encens et de myrrhe
pour mourir ainsi
entre tes bras!
Oui, je voudrais ainsi qu'un phénix
me consumer sur le bûcher odorant
de ta vulve qui d'elle-même brûlerait
et d'où je renaîtrais
comme cet oiseau du soleil immortel
aux plumes pourpre et or!
Ainsi la putréfaction se changera
en résurrection
et le cinabre sera transmué en or
par l'alchimie complexe du sexe
d'où dérive spontanément
la philosophie de l'âme
par l'entremise de la poésie érotique!
Ô mon Eros femelle,
tiens fermement dans tes mains
faites pour les touches du clavecin,
le flacon à parfum
répandant les effluves de senteurs
agréables aux Déesses,
à commencer par la Paphienne
qui s'était présentée au concours de beauté
dont Pâris devait être l'arbitre,
couverte de bijoux
et baignée d'aromates!
J'aime à la folie
ta démarche de torcol,
cet oiseau dont la mobilité
me transporte dans les régions extrêmes
de la volupté,
de cette Hédoné des Hellènes
qui en font une Déesse
à part entière!
Tant unique est ton allure
que tous les efféminés l'imitent
aux fêtes de Rhéa
et que les roses se prosternent
sur ton passage
qui humilie les violettes!
Vraiment, ta démarche
humilie toutes les fleurs
et pour elle Bacchus lui-même
se change en un adolescent éternel
afin de pouvoir t'aimer
à son aise!
À la façon d'une Orientale
ou d'une Africaine,
tu bouges dans tous les sens ton cou
dont tu fais un tour complet
sur tes rondes épaules
ainsi qu'un cygne blanc
dans un étang aux lotus bleus
ou comme une frêle danseuse,
mangeuse d'asphodèles!
Non, ma délicate amour,
je n'ai rien d'un guerrier,
et c'est pourquoi je n'excelle guère
dans la poésie épique,
n'exerçant mes armes indolores
que dans la prairie sans limite
qui parcourt le char nuptial
d'Hermès et d'Aphrodite!
CES OISEAUX DU DESIR
RECUEIL INEDIT. AVRIL 2005