À Une Argienne


Ô Argienne sortie de Chrysorhoas
toute couverte d'or,
tu es née des orangers
et des citronniers de l'Argolide
antérieurement aux étoiles,
à la lune et au soleil!


Ton corps même
a grandi aux accents de la lyre inspirée!
De par sa structure,
il semble la cuirasse en mailles de fer
d'un chevalier adoubé
par le Connétable de France
ou d'un chevalier arabe de Saladin
ou d'une Amazone euxine
ou d'une guerrière franque,
de celles qui sont chères
au coeur de l'Arioste,
ou enfin, d'une fravashi persane!


Ta croupe, en particulier, est
un bouclier fait de quatre peaux
de taureaux sauvages,
renforcées en dessus
d'une armature de bronze massif!


Elle évoque, par plusieurs de ses côtés,
la crissante armure d'acier
d'un chef de guerre dorien
de la haute antiquité
ou, plus près de nous,
d'un Conquistador espagnol des Amériques!


Or, si ta chair est dure et polie
comme le casque d'airain
de l'empereur Charles Quint,
elle est en même temps
plus tendre et plus légère
que le panache blanc
d'Henri le Grand
ou que les trois panaches superposés
du chapeau d'un gentilhomme français
du temps du Grand Roi
Louis le Quatorzième!


Mais ton magnifique corps
est, par ailleurs, aussi majestueux
que l'Inachos, le plus grand
des fleuves d'Achaïe
qui, quand la Terre se trouve
sous le signe du Taureau
et des Pléiades pluvieuses,
écume, gonflé de toutes
les eaux de Zeus
et devient le plus violent
des torrents de ce monde!


Quand tu apparais
sur mon chemin,
tu te détaches comme le rocher de Drépane
dans l'azur de la rue
que tu domines de ta tête superbe
de tigresse,
et où, sous tes pas rapides
et comme invincibles,
des arcs de triomphe végétaux s'élèvent,
des arcs-en-ciel floraux jaillissent
et des gerbes de blé
à peine fauché
se couchent sur l'asphalte métamorphosé
en sol fécond de la moisson!


Ô Bien-Aimée,
plus blanche de peau
que les sommets enneigés du Taygète,
c'est Aphrodite elle-même
qui t'enseigna l'art d'aimer!


Et c'est d'elle que tu tiens
la robustesse de ton âme
et ce désir sacré
de l'acte amoureux
à accomplir dans l'ivresse bachique
la plus exaltante,
mais avec gravité latine,
application germanique,
attention aux détails byzantine,
lenteur chinoise,
tendresse indienne
et lyrisme grec!


HYMNE A L'AURORE

RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2005