Célébration du Parfum de la Rose


Le mariage qui s'annonce
entre l'âme et le corps,
le sang de feu et l'esprit le plus éthéré,
l'inimitié et l'amour,
le Sud et le Nord,
le passé et le futur,
la vie et la mort,
ne pourra se consommer
qu'avec la bénédiction de Cypris
et par la contemplation
de la Rose à cent pétales
du Rhodope ou du Pangée
et au parfum pénétrant,
insidieux, insinuant et bouleversant
comme une jeune femme
dans toute sa senteur élyséenne,
dans toute la cosmique splendeur
de sa beauté embaumée,
dans toute la plénitude de son courage
et dans le zénith de sa force d'Hébé
dont la vulve est rose
comme une aurore d'été en Crète,
le sein aromatique
comme un air de trompette
célébrant la victoire des athlètes
aux Jeux de Némée,
la croupe provocante
comme le musc d'une voyelle nocturne
qui s'élance dans les airs
aussi haut qu'un cyprès apollinien
ou qu'un blanc peuplier du Céphise
ou comme une figure redondante
de Nonnos de Pannopolis
ou comme la cathédrale baroque de Séville,
faite pour plaire aux extravagants
et aux excentriques
et aux dandys catholiques comme Baudelaire
et, enfin, les prunelles éblouissantes
comme le jais pur
ou comme un pétiole de tulipe noire
ou comme un regard ivre,
porté sur un gynécée de Milet
ou de Smyrne
parfumé à l'ambre gris
et où des volutes d'encens
blessent nos narines
grandes ouvertes!


Or, le parfum de cette Rose Parfaite est
l'oriflamme, le sceptre,
la sphère armillaire
et le vase à arômes
dont la myrrhe de Chypre
et le benjoin de Chine,
des plus forts
d'entre les hommes et les femmes
et qui, certes, ne font guère partie
des grands de ce monde,
mais qui, sous l'oeil satisfait d'Eros,
résument à eux seuls
ou à elles seules
et à travers leur santé scythe
toute l'immense,
toute l'infinie Rhétorique
de l'Univers Saint!


LA FIANCEE DES OISEAUX

RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2006