Le Saint Trône
Ô vous, sceptiques qui me blâmez
de ne point écrire des poèmes cocasses,
saugrenus, burlesques,
futiles et sots,
ne savez-vous donc pas
que ce sont là des fardeaux
qui accablent les ménestrels infortunés,
point versés dans la lecture du Coran,
et ignorant tout des belles-lettres?
Que n'êtes-vous pas vous-mêmes
des esprits fins, des hommes exquis
et des sages?
Que n'êtes-vous pas des êtres beaux,
afin que je vous apprenne
les belles choses
exprimées par les belles paroles
qui sont l'apanage des natures
parvenues à la bonté des manières
et à un degré élevé
d'adresse et de subtilité?
Ignorez-vous que j'ai fait
l'ascension de la montagne fabuleuse
des diamants,
d'où on ne peut revenir
aux vallées basses?
N'avez- vous pas appris
que j'ai atteint l'oasis,
fraîche comme un dictame,
où l'on peut goûter en toute quiétude,
la beauté des roses et des myrtes,
la saveur des cerises et des abricots,
et la splendeur des animaux
qui y galopent,
ou des oiseaux de paradis
qui y chantent?
Là, mon âme se pâme
devant les coups de hanche
de ma petite esclave bien-aimée,
ce miracle d'entre les miracles musulmans,
ce prodige des prodiges hindous,
cette fantasia bédouine
de pouliches nacrées d'Arabie,
cette souveraine d'entre les reines,
ce jardin de toutes les lunes d'Allah!
Sans doute, vous n'avez jamais vu
son visage pareil
à la nouvelle lune de Mai,
à son premier lever,
et blanc comme la mousseline blanche
des turbans préférés
par les croyants!
Mais si vous voyiez son derrière,
vous me comprendriez!
Car il est gras
comme un porcelet de lait
au four des ardeurs divines,
chaud comme un coeur
de philosophe exalté,
et blanc comme la gorge
de la perdrix de montagne!
Et il brille comme un minaret
arrondi au soleil,
comme le dôme de la grande
mosquée de Damas
et comme la coupole de Sainte-Sophie!
C'est un trône de sainte,
et c'est un élixir de jeunesse,
bu à même la source
d'immortalité!
Ô vous tous, censeurs chrétiens
de Mahomet,
et agnostiques de tout crin,
souffrez que je parle avec ivresse
d'un sujet aussi sublime!
Sachez, pourtant,
que les propos des sages mahométans
prêtent à contestation,
mais sont définitifs et purs
comme des juments de race,
proportionnées et lustrées!
ISLAM
EDITIONS ENCRES VIVES. NOVEMBRE 2004