En Hommage à Gérard de Nerval


Dans l'étang indien de ta chevelure,
où je cueille le nénuphar de ton âme
et dont l'onde caresse
l'île ovale et rose de ta figure,
je vois se mirer tes nues
sculptées de cent soleils!


Et le souvenir me vient
de Gérard de Nerval
qui en son archangélique délire
s'est dépouillé un soir à Paris
de ses vêtements qui l'attachaient à la terre
pour s'envoler vers son étoile!


De même, quand je te vois,
ô sublime nue,
je rejette toute attache terrestre
et crois voyager en Orient,
sous les Pléiades,
par une nuit tiède et claire de Mai!


Et, tout à coup,
ému jusqu'aux larmes,
je vois le ciel s'entr'ouvrir,
le ciel aux jardins magnifiques
où j'entre chanter comme un rossignol
sur la plus haute branche d'un cèdre!


Là, parmi les appels des grillons ivres,
je demeure jusqu'aux premières
lueurs de l'aube d'été,
les yeux sombrés dans les yeux
d'une rose rouge,
luisante ainsi qu'un rubis
au milieu des étoiles
qui semblent grandes comme des topazes d'or
brillant sur un cou de reine!


Tout tremblant d'amour,
je contemple cette rose,
la prenant pour la destinée extraordinaire
d'une princesse nue!


Et juste au moment
où l'aurore commence à s'affirmer,
je monte l'escalier majestueux
qui mène de l'atmosphère au Paradis
où dans une salle aux mille colonnes
et parée comme pour un festin,
je suis reçu triomphalement
par les séraphins du matin!


Des chérubins blancs
comme le marbre de Carrare
s'approchent de la table
où je suis assis,
versant dans ma coupe,
ainsi que des échansons,
du nectar hindou!


Tous mes convives autour de cette table
sont jeunes et appartiennent
à toutes les races,
mais ils ont pourtant
les visages familiers de mon enfance!


Et c'est ainsi que se révèlent à moi
l'immortalité de l'âme,
qu'auparavant je croyais
un dogme indéfendable,
et l'unité de la divine pensée
qu'est l'Univers!


NOCES VERNALES

RECUEIL INEDIT. JANVIER 2005