En Souvenir d'Alfred de Musset
Ma fantasque maîtresse
demeure rue des oliviers!
C'est une Andalouse au pied menu,
au flanc bouleversant
pour lequel je donne tout mon sommeil!
Elle est douce
comme une hirondelle au printemps
et lyrique comme une mandoline!
Quand je ne suis pas avec elle,
elle est toujours au balcon,
guettant mon arrivée chez elle!
Je laisse alors loin derrière moi le monde,
oubliant jusqu'à la vie
et trouvant superflu
tout ce qui ne se rapporte directement
à son amour d'Andalouse jalouse!
Je me sers de ses prunelles
pareilles à une Vesprée violette,
pour me protéger
de la lumière du jour,
trop envahissante quand il s'agit
de livre contre elle
la bataille suprême!
Ses baisers ont la rage
d'un faucon qui se serait échappé
d'une cage toute en argent,
mais les intonations de sa voix
sont aussi fraîches
que les trilles d'une mésange!
Et l'aube venue,
elle me presse encore
contre elle
sur sa couche embaumée
où je l'étreins comme un troubadour,
comme un roi,
comme un fou!
Qu'importe si Madrid
n'est plus la ville
féroce et pure
qu'a connue Alfred de Musset
et que sillonnaient gaiement
des hommes montés sur des mules
ou des nobles demoiselles sur des haquenées!
Oui, Madrid a beau être aujourd'hui
une mégapole n'offrant plus
qu'une vie de néant,
sans sang ni entrailles!
Rien ne nous empêche de nous aimer
comme un empereur et une impératrice
se promenant sur un blanc palefroi
qui doucement les élève dans les airs
comme dans un conte persan!
Là-haut, dans les airs,
nous attendent pour nous sacrer
roi et reine
les poètes de l'Espagne ancienne,
l'Espagne de la semence du Phénicien,
de l'Ibère, du Goth, du Maure
et de l'Arabe,
l'Espagne d'hier où dans une forge sous terre
Federico Garcia Lorca martelait
les poèmes de la lune gitane
et le romancero de la vega de Grenade!
NOCES VERNALES
RECUEIL INEDIT. JANVIER 2005