Annonce d'une Nouvelle Aurore


L'amour rend légère
comme une plume d'oie
ta croupe lourde et pesante
comme la porte d'or massif
du palais de l'empereur de Constantinople
ou comme le trône incrusté d'ivoire
et de pierreries
du Grand Moghol de l'Hindoustan,
ou comme l'arc d'argent
dont les flèches meurtrières
régénèrent l'esprit
en versant le mauvais sang
des chagrins
et en crevant l'abcès de l'affliction!


Oui, l'amour enlève ton derrière
comme le zéphyr
emporte les feuilles des rosiers
et le métamorphose en réverbère
où les papillons viennent
s'y faire brûler les ailes,
ces chefs-d'oeuvre de leur coeur,
afin que, consumés d'amour,
ils meurent à eux-mêmes
et deviennent des brûlés de l'amour
et des noyés de l'extase!


Si je languis de toi,
ô perle rouge
cueillie dans l'océan tahitien,
c'est que je suis le plus exalté
des hommes de mon temps!


Et les envieux et les lâches
m'ont toujours reproché
cette exaltation qui fait de ma tête
un réservoir inépuisable
d'hymnes d'église,
tous dédiés à la Déesse Mère,
la Créatrice des trois mondes,
la Sultane de l'enthousiasme sacré,
la Fleur des amoureuses,
Celle qui embaume comme la giroflée
et comme la rose,
la Nacre bénie entre toutes les nacres,
la Nef qui tangue
et qui roule sur une mer des guitares
et d'aouds,
la Sainte Sagesse,
unique destinataire
de tous les chants de rossignols,
la Sophia des Byzantins,
la Majesté des Romains,
la Madone des Italiens,
la Gravité des Grecs,
la Section d'or de Pythagore,
axiome de toute réalité
et de toute vérité,
l'Air des songes,
fontaine de l'algèbre
et l'Alvéole des abeilles,
mère de la géométrie!


C'est que j'annonce une nouvelle aurore
où le Dieu Unique
sera, comme aux premiers temps
de l'humanité,
la Grande Déesse de la beauté
et de l'espérance,
aux fesses saillantes
comme sur les fresques
des grottes,
aux seins lourds
comme les cloches de Notre-Dame!


LA ROSE DU BONHEUR

RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2005