De l'Abondance en Poésie


Ô Olympias, princesse d'Epire,
reine de Macédoine,
je suis le serpent aux formidables écailles
et aux mille anneaux
qui viendra une nuit
où la lune fulgurera dans le firmament
s'étendre à tes côtés,
sur ton propre lit royal
et te fécondera
par des amours adultères
et, cependant, divines!


Et de tes flancs magnifiques
naîtra Alexandre,
celui qu'on appellera le Macédonien,
le Conquérant, le Grand,
le fils légendaire d'Olympias et d'Ammon
incarné en un puissant reptile d'Egypte,
le même qui, plus tard,
engendrera Scipion l'Africain!


Ô grammairiens incultes et arrogants
qui semblez confondre
l'abondance et la générosité
avec l'enflure, la boursouflure
et le style ampoulé,
oui, j'avoue, je suis un rhapsode
éloquent et abondant et ample
et je féconde de mes eaux bouillonnantes
de Nil en crue,
les épouses légitimes
comme les courtisanes
et comme les concubines
aux courbes révolutionnaires!


Oui, ô maîtres inquisiteurs
de l'âge nouveau ou américain,
il y a de la sorcellerie
dans mes hymnes!


Vous qui poursuivez les sorcières,
comme vous appelez les femmes libres,
poursuivez aussi les magiciens du verbe!


Ne sont-ils pas aussi dangereux
pour l'Etat
que les sorcières?


D'ailleurs, ils sont les amis,
les amants et les laudateurs
les plus téméraires
de ces dernières!


Or, nous autres alchimistes de la parole,
nous sommes désarmés
face à vous,
les vrais détenteurs du pouvoir
dont les discours mielleux
imposent à la multitude!


Cependant, quand même
vous nous enfermeriez
dans un sombre cachot,
nous ne continuerions pas moins,
en authentiques chimistes,
à conduire nos poèmes
du fer et du plomb de la réalité
à l'or coronaire
de la victoire imaginale,
c'est-à-dire soufie!


Oui, je suis violent et emporté
comme Carnéade,
le philosophe platonicien!


Oui, je suis grandiloquent comme Ulysse,
le menteur et le sage
qui mentait de par sa sagesse même
et dont les propos
étaient imbibés de persuasion
comme le grain de raisin
est imbibé de jus!


Foin des écrivassiers
qui dissimulent la maigreur de leurs idées
sous une prétention vaine
à la sobriété et à la concision!


Non, de même que les cordages d'un navire
doivent être puissants,
de même que les hanches des jeunes femmes
doivent être bien en chair,
de même la faiblesse de l'inspiration
est méprisable en poésie,
car elle est le domaine des médiocres
dont l'existence est blâmable,
voire impardonnable!


LES FAUCONS DE FEU

RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2005