L'Aède et les Vierges
Je rêve que je me roule
dans le monceau de chrysanthèmes
de ton délicat petit popotin
que tu caches sous ta robe
vaporeuse du dimanche,
ombrée d'une ombrelle rose,
à la façon d'une demoiselle
florentine de naguère
qui, en se balançant
dans une prairie de Toscane,
répand autour de ses petits pas
la rosée des étoiles!
Et je me perds dans la couche
de plumes de paon
de ta chevelure que tu as opulente
et douce,
sensible aux caresses et aux
louanges des poètes
et propice à la quête de la fragilité
que dès son jeune âge le plus tendre
toute jeune femme doit entreprendre,
si elle veut,
en se plaisant à elle-même,
plaire à un jeune homme
un tant soit peu hors du commun,
pourvu qu'elle aspire à une romance
en dehors des chemins battus!
Or, je suis un aède
qui infatigablement recommande
aux vierges de son temps,
aussi vulgaire que soit celui-ci,
de garder vivante dans leur esprit
et jusque dans leur coeur
l'image sacrée des jeunes filles
de condition noble
ou des bergères,
telles qu'elles apparaissent
dans les romans grecs de l'antiquité!
Ô jouvencelles amies,
que vous soyez naïves comme des Castalides
ou passionnées ainsi que des Bacchantes,
exigez de vous-mêmes
que les motifs de votre conduite
ne soient autres
que le Bien Faire
et le Subtilement Penser!
De grâce, n'écoutez pas
les pies grièches qui jacassent
sur l'infidélité,
inévitable à les entendre,
en amour!
Vous-mêmes, soyez fidèles à l'amant,
car c'est le propre des filles éveillées
que d'être constantes!
Et laissez les filles endormies
par de vilaines habitudes
patauger jusqu'au sein
dans la vase gluante de la cruauté,
domaine des vierges
que le Maître appelle folles!
Ô Immortelle Bien-Aimée
qui médites toute seule sur un môle,
un livre de poèmes entre les mains,
ensemble chantons en pleurant
dans l'onde sainte
de la harpe du soleil d'automne,
la plus angélique des harpes suaves,
jouées par les chérubins joufflus
qui forment le cortège de Marie!
FLEURS DE SOLSTICE
RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2005