Par-delà l'Espoir


Ne m'enviez guère
le peu de bonheur que je possède,
ne me plaignez point
pour mon hypothétique malheur!


Car je suis en deçà
du doux Alphée de la joie
et au-delà de l'Hèbre surabondant
de l'affliction!


Le brillant Ovide
n'affirmait-il pas
que toute espérance est légitime,
pourvu qu'elle naisse du mérite?


Je suis donc fondé à espérer,
oui, à espérer l'arrivée de l'Amour
et à attendre la Gloire!


Or, elles viendront
toutes les deux,
ainsi que des aimables soeurs
aux mamelles riches de génisse!


Non, je ne suis pas
rassasié d'Eros,
mais plutôt repu d'espérance amoureuse!


Oui, toute ma vie
je n'ai cessé un seul instant
de croire qu'un matin parfumé d'Avril
Junon Pronuba,
Déesse qui préside aux noces,
préparera mon lit nuptial
et que Vénus finira par m'atteindre
de ses flambeaux
et que Cérès illuminera
ma tardive félicité
de sa torche
allumée aux feux de l'Etna!


Et jamais je ne ris
et jamais je ne pleure!


C'est que j'ai épuisé
mon carquois de rires
et mes sanglots eux-mêmes
sont fatigués de la stérilité du sol
sur lequel ils tombent!


Or, c'est la terre entière
qui est devenue une vaste sépulture égyptienne
où gisent embaumées
toutes ensemble
les larmes d'extase
et les larmes de chagrin!


Car toutes,
aussi fécondes en elles-mêmes
qu'elles soient,
ne sont plus destinées
qu'aux ombres du Léthé
et qu'à l'onde noire du Styx!


Cependant, je persiste à supposer
que parvenir au-delà
de l'espoir et du désespoir,
c'est aller dans la bonne direction,
la direction qui mène,
par-delà les miasmes de la Ville,
au Paradis terrestre!


MERS DE VOLUPTE

RECUEIL INEDIT. DECEMBRE 2005