Le Pouls du Paradis
Les regards chauds des jeunes femmes sont
les roses ardentes,
pourpre et or,
qui se lèvent au crépuscule attique
sur le Lycabette
et dont la rosée j'aspire
jusqu'à leur ultime splendeur
et jusqu'à ce qu'elles expirent!
Une violente jeunesse les gouverne
qui fait tendre leurs trente pétales
comme des arcs parthes!
Leur velours m'enveloppe tout entier
et pourtant leurs flèches
m'atteignent au centre du coeur
et frappent ma face
où le sang victorial afflue
afin de leur offrir
le bûcher de mes lèvres
allumées aux feux de la Saint-Jean!
Ah! Si je pouvais les effeuiller
calmement, lentement, voluptueusement,
couché dans leur giron
et la tête penchée sur leur sein
où bat le pouls du paradis
comme la pulsion même du bonheur!
Mais quelle est cette chanson
qui tout à-coup se lève
comme un souffle brûlant
venant de Benghaze, de Tripoli,
de Tunis ou d'Alger
et dont les fins rameaux
montent vers le nord-ouest
jusqu'à Lisbonne
et vers le nord-est,
du côté d'Athènes!
Emporte-moi, ô bachique barcarolle,
entre tes serres
d'aigle royal
et fais-moi tournoyer
dans l'Infini de l'Amour,
au-dessus de l'océan du Midi!
Cependant, je m'arrête ici
afin de reprendre mon haleine
et d'invoquer pendant un instant
la poétesse arcadienne Anyté,
la poétesse dont le nom même
évoque la satisfaction
née de l'oeuvre
menée à bon terme,
de l'ouvrage achevé,
afin que le poème ci-présent
soit mené à un havre bienheureux
de la très chère Ithaque
vers lequel mon coeur
louvoie en secret!
Or, le temps est venu pour moi
de livrer mon secret
au vent en liesse qui me ravit
ainsi qu'une nacelle véloce
à ce port étranger
où je suis comme exilé,
banni de la vie véritable!
LE PAPILLON D'OR
RECUEIL INEDIT. MARS 2006