Le Poète et la Fête


Par une ardente après-midi d'Août,
sur mon balcon mangé par les fleurs du Coran
et la vigne sauvage,
et cependant qu'un soleil opulent
ruisselait des frondaisons,
j'ai rêvé d'une fête publique
où toutes les discordances
se résoudraient en une heureuse harmonie
et où douleur et joie,
rire et larmes
se mêleraient en un parfait accord
qui transcenderait le sombre drame
se jouant dans toute société humaine!


Sans doute, de telles fêtes
ont-elles existé dans le passé,
comme les Panathénées à Athènes
ou les festivités du solstice d'été
en Egypte
ou le Carnaval à Venise,
la Fête-Dieu en Espagne
ou le Bayram à Constantinople!


Mais, depuis que toute volonté de puissance,
consistant dans la domination sur soi-même,
s'est retirée de la scène du monde,
on ne se souvient plus des fêtes
que par leur nom
ou alors, ces dernières se sont transmuées
en leur contraire,
à savoir dans la morne tristesse
d'une simple réjouissance
de pure coutume
et de publiques, elles sont devenues
une affaire privée,
une fête juxtaposant autant d'égotismes
qu'il y a des humains!


Cependant, il suffirait que
du cerveau d'un poète
ressurgisse ce vent du Nord
qu'est la volonté de création
pour que la fête réapparaisse,
pourvu que ce poète
ait remporté le premier prix
dans la course de chars de l'Esprit!


Alors, on verrait, à nouveau,
le peuple de la cité
s'acclamer soi-même
et danser sur la place publique,
couronné de roses!


LA REPUBLIQUE DES OISEAUX

RECUEIL INEDIT. 10 AOUT 2006