Oeil de Lys


Si je n'obtiens pas de toi
que tu t'ébattes avec moi,
je me pendrai au palmier
le plus magnifique d'Attique,
ô toi qui as dérobé ta séduction infinie
aux plus belles des palmes,
celles d'Egypte et de Syrie!


Et je tombe à tes pieds
et je me prosterne devant ton pubis
que je couvre de baisers volés!


Ne suis-je pas ton esclave,
celui que tu achetas
au prix d'un léger balancement
de tes hanches
et d'un mouvement imperceptible
de tes lèvres
vers mes lèvres?


Il est vrai que c'est là
un prix énorme à payer,
égal à celui du Céphise de Béotie
dans sa gloire cadméenne
et de l'Alphée dans sa suave lenteur,
quand il va à la rencontre d'Aréthuse!


Ne me garde pas rancune
de mon excitation,
ô douce de mon coeur!


Ne suis-je pas tout entier
occupé de tes seins musqués
et de tes fesses
lourdes comme les pastèques
couchées dans le soleil
de l'été de Calabre, de Grèce
ou de Chypre!


Puisse ce poème parvenir
à tes oreilles fines,
car il est plus beau
que les filles d'Athènes,
si palpitantes quand elles vont
à un rendez-vous amoureux,
et plus orgueilleux
que ces belles intraitables,
si indifférentes et si désirables!


Puisse ce poème te convaincre
de l'urgence qu'il y a
à tenir une séance d'amour
consacrée à nous deux
et qui se passera toute entière
en accolades, embrassements, baisers,
caresses profondes, égratignures d'ongles
et pénétrations,
sinon mon corps ne passera pas la nuit,
sinon je me tuerai
comme l'infortuné Gérard de Nerval,
non par une nuit glacée de Paris,
mais par une soirée chaude des îles
où le rossignol chantera
sa complainte éternelle!
Si j'étais habité d'une âme
autre que la mienne,
je ferais une bouchée des jeunes filles!


Or, cela est inconcevable pour moi,
car l'unique secret,
gardé jalousement
dans la chambre nuptiale
de mon esprit,
c'est toi, ô fine taille,
nymphéa de mes yeux,
oeil de lys!


MELEES D'AMOUR

RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2005