Sur les Traces de la Bien-Aimée


Toute terre m'est égale
où ma Bien-Aimée n'est pas!


En effet, il m'est parfaitement indifférent
d'habiter la terre des Mayas
ou celle des Han,
la contrée des Incas
ou celle des Tamouls,
le golfe de Guinée
ou celui du Bengale,
l'archipel des Antilles
ou celui des îles Andaman,
tant que je n'y ai pas décelé
des signes infaillibles
de sa fastueuse présence,
tant que je n'y ai pas reconnu
les empreintes de ses pieds
sur le sable
ou les traces de ses sandales
dans la poussière des rues,
tant que je n'y ai pas senti
la senteur de rose
de son sein,
le parfum d'oranger
de ses aisselles
ou le baume souverain
de ses cheveux châtains!


Et je n'aurai des preuves palpables
de l'existence d'une sagesse
un tant soit peu divine,
tant que je n'aurai pas vu
un portrait peint d'elle
dans un temple, dans une pinacothèque
ou dans un hôtel particulier,
tant que je ne me trouverai pas
devant l'icône
de ses noires prunelles
dont le regard est voilé
par l'aura de sa personne
si noble et si glorieuse!


Si toutefois, il est confirmé
de source certaine
qu'elle est vivante,
je m'en irai par la vaste terre
la chercher!


Oui, j'errerai à sa recherche
sur les rivages de Somalie
ou de l'Yémen,
au grand bazar de Lahore
ou au fort de la Vieille-Delhi
ou aux fumeries d'opium
à Saigon
ou sur les plages coralliennes de Polynésie
ou sur les quais
de Santiago du Chili
ou dans les mangueraies de Saint-Domingue
ou, enfin, sur la place
des Trois Cultures
à Mexico la Métisse!


Et de répandre
à grande profusion
l'encens de mes prières ferventes
sur tous les autels,
les bouddhiques
comme les chrétiens
ou les païens,
voire sur les monuments
de tous les marabouts d'Algérie,
afin que l'imperturbable destinée
favorise mon dessein
de retrouver ma Bien-Aimée
vive et toujours belle!


LE MIROIR ARDENT

RECUEIL INEDIT. OCTOBRE 2006