L'urbaniste sacré


Entre Sud et Nord,
entre Ouest et Est,
entre les palais et les temples,
entre les citadelles
et les observatoires,
l'urbaniste sacré établit le cadastre
concis
de la ville la plus claire,
des grands fonds des champs élyséens
aux bouches, infantes éternellement,
du Tage,
du paradis regagné de l'Uruguay
aux édens regrettés de l'Orénoque,
du premier débarcadère à riz
du fleuve Jaune,
en venant du côté de l'aurore,
au dernier quai de Guadalquivir,
du cap de Saint-Vincent,
Oméga des blancs,
à la chute du Pacifique
en l'Orient ultime,
de la septième enceinte
de Babylone
au château de Ninive,
de la porte morte de York
à la porte abolie de Lancaster,
de la côte saignante
de Burgos
aux reins aériens de Limoges,
de la passerelle du cuivre huppé
au pont du cristal andin,
de la rive bonifiée aux Hindous
antérieurs
à la rive suspendue
aux Incas couronnés,
des faubourgs celtibères
en marbre de Lisbonne,
voués à la déesse de la lune,
au quartier du marché
des Nouvelles-Indes,
dédiés aux races semi-divines,
de la Grand-Place fabuleuse des Argus
à la place, plusieurs fois légendaire,
des taureaux,
de la promenade argentine
des parfaits
à l'avenue faîtière des insurgés,
des verges empedocléennes d'aval
aux piliers précolombiens d'amont,
de la route de Cuzco,
ou route du plus petit
cri du coeur,
ou route de la joliesse
jamais rencontrée,
ou route bénite,
ou route de la foudre
d'allégresse,
à la route de Panama
ou route de la dynamite
de l'esprit,
ou route de la fission
de l'âme,
ou route de la véritable
annonciade,
ou route des sandales
volantes,
ou route médiane
de la terre bleue naissante!
Soudaine transparence
des phénomènes
dans les cieux personnels,
ô semence de ville antique
à venir!


LE GRAND RETOUR

PUBLIE CHEZ L’AUTEUR EN OCTOBRE 1980