Hymne aux Callipyges Dames
De même que, selon le proverbe,
on reconnaît un lion à ses griffes,
de même on reconnaît une femme,
belle comme une plante sauvage,
à sa hanche bien en chair,
toute large comme la mer Egée
et toute ronde
ainsi qu'une pleine lune
dans un ciel d'été
et toute dure
ainsi qu'un coing de Crète énorme
et toute brûlante
ainsi que le feu des étoiles
et toute parfumée
ainsi qu'un bâton d'encens du Marib
et toute élastique
ainsi qu'une lame d'épée
et toute rose
ainsi que la plume caudale
d'un phaéton d'Océanie!
Et on peut constater
que, de manière générale,
l'originalité d'une dame
se mesure à la puissance génésiaque
et à la grosseur démesurée
de sa croupe d'ânesse ou de zébresse
ou de pouliche ou de tigresse
ou de lionne d'Afrique!
Et plus ses hanches
sont polies comme le cuivre
ou le bronze
et brillantes
ainsi que des miroirs ardents,
plus la femme sait jouir de la vie,
tout en ne renonçant guère
à la contemplation de la divinité
à travers les prunelles
de l'être aimé
et à l'amour pour les Idées pures!
Justement, ses fesses grandioses
témoignent de la singularité,
voire de l'authenticité
des desseins de Vénus
à son égard!
Peut-être, Aphrodite veut-elle
faire d'une femme pareille
le modèle de la beauté
et le paradigme de la bonté
et le parangon d'une vertu
de fertilité,
et non de stérilité!
Au moment où je compose
cet hymne en hommage
aux callipyges demoiselles,
juste à côté de moi
un couple d'amoureux
se livre à des caresses réciproques
avec avidité
et avec une effronterie bienvenue
que je salue!
Ah! Puisse la brise
des blancs peupliers
qui souffle au-dessus
de ma tête rêveuse,
oui, puisse cette brise
porter à cet amant
et à cette amante
des semences de pensée
étrange et baroque,
arrachées à cette ode
ci-présente,
où il est surtout question
de jardins suspendus
semés de roses de Babylone
et de terrains
plantés à perte de vue
de vignes d'amour
entrelacées aux fiers cyprès
de la verticalité
ou aux ormes hospitaliers
de la connaissance de soi!
LE COBRA DE BRONZE
RECUEIL INEDIT. OCTOBRE 2006