À la Perle des Perles


Ô mon pur sang, ma douce jument
de race arabe,
tout en toi est proportion et harmonie
et tu sembles avoir été façonnée
selon les nombres de Pythagore!


Et la Déesse de l'Amour
a tant mis d'enchantement
et de fraîcheur
dans tes yeux et dans ton âme
que mon âme s'en rafraîchit
et que mes yeux s'en émerveillent!


Et je tressaille en mon coeur
quand je vois ta taille
plus fine qu'une bague de reine
ou qu'une boucle d'oreille
de jouvencelle algéroise toute belle,
et plus flexible qu'un serpent
qui danse au bout d'un bâton,
et plus délicate qu'un rameau de saule
et cependant incassable
comme un acier indien
de trempe extraordinaire!


Et je languis outre mesure
rien qu'à imaginer
ce qui est caché sous elle!


Quelle croupe formidable
doit être la tienne!
Que de rossignols doivent y chanter
extatiquement, éperdument, magiquement!


Que de roses doivent s'y épanouir,
embaumés comme en Mai!


Quels paons merveilleux
doivent y faire la roue
de toutes leurs plumes de saphirs!


Que de cygnes
au duvet immatériel
doivent y danser,
tout en se lissant!


Louanges à Aphrodite
qui a mis en toi
toute la splendeur de l'univers
et toute la gloire des royaumes
les plus puissants de la terre
et toute la majesté des empires
vastes comme l'Océan!


Tes seins brûlent
comme un incendie de forêt
et des rayons de pleine lune
viennent de tes chevilles
plus blanches
que les plus blanches des colombes!


Quant à ton visage,
il est comme un salon de palais
aux tentures claires
où je me trouverais
au milieu de mille flambeaux
portés par des jeunes filles des îles,
belles comme des aurores en mer
et enflammées comme des crépuscules
dans les tropiques
ou au Maghreb el Acsa!


Quand tu chantes,
les alouettes, les fauvettes,
les coucous et les merles
se taisent, sidérés et éblouis
de tant de beauté!


Même la brise printanière
s'arrête afin de me permettre
de me concentrer sur ton seul chant!


Ô perle d'entre les perles,
où Vénus te cachait-elle
jusqu'à ce que tu te révèles
à mes sens et à mon esprit?


Sans doute, la Déesse
te jalousait-elle,
car elle pressentait
la germination en moi
d'odes à perte de vue
et qui auraient toi, et non pas elle,
comme sujet et objet à la fois,
ô souveraine,
ô première des jouvencelles,
ô houria des hourias,
ô perle unique,
demeurée à ce jour scellée
et qu'intrépide
moi seul je perforerai!


LA ROSE DU BONHEUR

RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2005