Yeux de Jais
Tes hanches sont deux énormes
aétites de Taphiusa la Leucadéenne
et ta croupe toute entière
évoque les ailes déployées
d'un aigle d'ophite blanc,
en train de s'envoler
du faîte du Capitole
vers les espaces radieux
où règne sans partage
le soleil impérial de Rome!
Tes fesses, polies à la pierre ponce
des îles Eoliennes,
sont dorées comme la marcassite de Chypre
et semblent de la sorte
des cieux d'Italie
illuminés par la pyrite solaire
qui fond au feu de l'été
embrasant la Ville Eternelle!
Ton pubis, quant à lui,
est une roseraie de marbre noir
du cap Ténare, en Hellade!
Le jais de tes prunelles,
si poli, si uni,
si léger, si brillant,
brûle même dans mes eaux
glacées par une attente
qui aura duré toute ma vie!
Car, c'est un jais
que je suis allé trouver
dans l'onde même
du fleuve lycien Gagis,
c'est-à-dire que je l'ai puisé
à sa source
en téméraire explorateur
de l'Être des choses
et en savant exégète
de l'Âme de l'Univers!
Oui, le jais de tes yeux
brûle dans mes entrailles
et la seule manière de l'éteindre,
ce sera de répandre dessus
l'huile de mon sperme
lors de la conjonction
de nos deux astres
dans le ciel de Vénus!
N'était le bleu aimant éthiopien
de tes cheveux
qui irrésistiblement m'attirent,
je me tuerais
sur l'autel de Némésis,
à Rhamnonte, en Attique!
Or, tu sembles t'être échappée
toute entière,
de la tête jusqu'aux pieds,
de quelque chef-d'oeuvre du Bernin,
tant tu es la quintessence
de mon âme baroque
et l'être dans lequel
j'ai placé tout ce que mon ambition
compte de noble
et suppose d'ailé!
SANG-DRAGON
RECUEIL INEDIT. NOVEMBRE 2006