La Question d'un Poète
Bien qu'un fleuve d'opulence,
de volupté et de liberté
coule à mes pieds,
je suis empêché d'en boire l'eau
qui ferait de moi un amant!
J'ai soif, bien que je ne manque guère
d'eau!
Oui, mon supplice est
le supplice de Tantale
empêché de toucher aux fruits
disposés en abondance devant lui!
Or, comme Tantale j'ai faim
et soif,
quoique je couche dans la source même
des biens de ce monde!
Ma vie fut un perpétuel outrage!
Oui, ce fut un concubinage sans plaisir
et un adultère stérile!
Non, je n'en ai récolté
pas une once d'or solaire,
pas un empan de gloire,
pas un arpent de joie sans mélange!
Cependant, alors que j'écris
la confession de mes malheurs,
le soleil luit au milieu du ciel
comme une Déesse
dont je boirais les baisers!
Mais, peut-on vivre seulement
de l'amour d'une Déesse?
Ne faudrait-il pas, plutôt,
qu'une mortelle vienne me rafraîchir
le front et les lèvres
de sa bouche de jasmin et de rose?
Ouis, cette mortelle,
ne devrait-elle pas
venir lutter amoureusement
avec moi,
sur une jonchée embaumée
de fleurs d'oranger?
Et l'écho de répéter à l'infini
cette question
destinée à rester sans réponse,
comme toutes les questions
adressées par les humains
à l'azur immense de midi!
LE TOIT DE TULIPES ROUGES
RECUEIL INEDIT. JANVIER 2007