La Nymphe du Coeur

Ô ma cavale brune
de race noble,
tes cheveux sont des grappes
de raisin muscat
qu'une bruine de Septembre
aurait fait lisser et briller
comme la crinière d'un étalon noir,
confondue avec les rayons de la lune!


Ô ma gazelle enamourée,
tes grands yeux d'antilope sont
les sceaux de ma passion pour toi,
apposés sur ma poitrine,
dans la région cardiaque
où bat ma vie
qui ne relève que de toi
et de ton domaine inviolable
et qui ne fait que te célébrer
jour et nuit
comme un nouveau-né sa jeune mère
et comme un nourrisson sa nourrice!


Ta bouche fleurit comme un grenadier
dont les fruits seraient
des rubis de Ceylan
et à l'intérieur tes dents resplendissent
comme des pétales de jasmin
épanoui dans le jardin de tulipes rouges
du Paradis!


Ta langue, oiseau de ta bouche,
fait un avec le souffle des Pléiades
quand elle chante la nuit
comme un rossignol pathétique
perché sur la plus haute branche
d'un cyprès attique!


Ton sein est magnifique
comme le balcon de nacre
d'un palais neuf
dans la ville sainte de Koufa,
joyau de l'Irak!


Et, c'est de ce balcon
que tu me jetas
un beau matin serein
de fin d'hiver
le mouchoir de soie
de l'élection!


Tes reins où les signes avant-coureurs
de la possession abondent
sont des cieux incandescents de Juillet
en Syrie
et des aurores splendides
en Palestine!


Ta taille est plus svelte
qu'un peuplier blanc
qui vient de se marier
et plus onduleuse
qu'une danseuse sacrée
de l'amour sainte
la plus dévergondée,
la plus licencieuse!


Ta culotte tissée de cornalines de l'Yémen
semble un pavillon de satin rouge de Chine
où se trouverait un bassin d'eau de roses
et un lit d'ivoire
sur lequel tu serais étendue
dans l'attente d'Aphrodite l'Adoniade
et de son fils Eros!


Bienheureuse ta croupe
sous la dentelle fine
qu'ont tissée les nymphes de l'aube
comme dans un songe d'été!


Et bienheureuse ton âme
qui est la nymphe de mon coeur!

LES DOUX ANONS DU PLAISIR

RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2005