À l'Epouse Bien Galbée


Ô épouse bien-aimée,
ton regard est fascinant
comme le regard d'un faon
encore à la mamelle
ou celui d'un lotus azuré
qui gît dans l'étang
du jardin de Loumbini!


Et si tes cuisses, toutes fermes
et toutes rondes,
sont un tronc de bananier,
tes fesses blondes sont les feuilles
de cet arbre de gloire!


Ta taille, souple et flexible à l'excès,
humilie le cobra
et rabaisse l'orgueil du palmier
qui se balance dans la brise!


Et ta gorge est gonflée
de vin rouge,
de ce même vin
qu'on offrira en libations aux Déesses
lors du sacre de l'Amour
où seront particulièment honorés
Anacréon et les Aèdes
qui l'ont suivi jusqu'à aujourd'hui
et qui le suivront sans doute demain!


Ô coquette,
si je m'absente un moment,
tu saisis l'occasion rêvée
pour faire ta toilette
devant ton miroir de bronze,
en rougissant tes lèvres
avec du suc tiré du murex du Liban
ou des cochenilles du Mexique,
en bleuissant tes paupières
avec du jus de prune de Damas
et en te poudrant les seins
de pollen de cytise!


Si je garde le silence
pendant que nous sommes ensemble,
alors tu poses doucement ton front
sur mon épaule
et tu pleures,
offensée par ma désinvolture!


Mais quand je t'enlace,
tout en te parlant avec tendresse,
alors expire sur ta lèvre
ce reproche éternel que tu me fais,
de chanter d'une façon indiscrète
ta hanche incomparable
et de te livrer ainsi
au mépris des parangons de la vertu!


Or, ta hanche m'a inspiré
plus de mille hymnes
à la gloire d'Aphrodite la Callipyge
et du plaisir qu'on tire
d'un beau galbe,
d'un galbe d'or!


LE TOIT DE TULIPES ROUGES

RECUEIL INEDIT. JANVIER 2007