Ode à l'Universelle Séduction


Ô ma génisse d'or,
ma taure laitière,
ma vache adorée,
toi, ma nourricière,
ma nourrice
et ma mère
entourée d'un choeur
de seize mille jeunes bergères
au sein de qui
je me sens comme un petit dieu pastoral
d'Arcadie, de Chypre ou de Phénicie,
ô toi qui me donnes tout
ce que j'exige de toi,
accorde-moi aussi
ton sein gras et lourd,
paré de colliers à multiples rangs
de corail et de pierreries
et si riche en lait
qu'il en palpite
sous le chemisier
de mousseline blanche!


Vite que je m'empare
de tes seins et de ta croupe
qui est pareille à un arc
dont la corde tendue
serait la raie qui sépare ses deux moitiés
et dont les flèches seraient
les extrémités supérieures de tes cuisses
rondes à souhait!


Or, si les Grecs anciens
ont chanté tes grands yeux de vache,
à moi, il appartient de célébrer
l'attache de tes bras,
tes belles omoplates
et le point de jointure
où le fleuve opulent
de ta cuisse troublante
se jette dans la mer fameuse
de ta divine hanche!


Ô lecteur qui as eu déjà l'occasion
de te pencher sur mes écrits,
tu t'es sans doute aperçu
de la facilité avec laquelle
je compose des odes
où les caresses voluptueuses
alternent avec les ébats printaniers,
les jeux d'amour les plus innocents
avec les divertissements les plus agréables
et les plus suaves,
les câlineries faisant nager
les prunelles flottantes
des danseuses indiennes
avec les coquetteries de femmes
fortes en hanches
et distillant le miel de thym!


Et, à bon droit,
tu dois te demander:
-cette profusion d'images
et cette prodigalité érotique
visent-elles à autre chose
qu'à un raffinement
confinant à la décadence?


Or, moi je n'aspire
qu'à faire comprendre au peuple
ce qu'il savait déjà
et qu'il ne sait plus,
à savoir que de l'universelle séduction
naît le bonheur
qui entretient avec succès
la vie sur terre
et assure son exubérance
et son éternelle exaltation,
fondement de la volonté
de dépassement de soi
et donc du désir de surhumanité!


Et si mes vers s'égrènent
avec tant d'aisance,
c'est que je suis animé d'une langueur
égale à celle de Yayadeva,
ce maître hindou,
auteur de la pastorale de Gita-Govinda
où il chante les amours
des belles du Braja et de Rhada
avec Krishna, cet avatar,
comme le Christ,
de Vishnou, Notre Sauveur,
le Mainteneur de la Tradition!


Et de même que Yayadeva
était natif du Bengale,
terre d'amour et de jasmins,
de même, moi, je suis le fils
de cet Orient de la Méditerranée
où Aphrodite est née de l'écume de la mer,
au large de Paphos la Sainte
et la Pure!


L'ABEILLE DE LA VOLUPTE

RECUEIL INEDIT. FEVRIER 2007