Le Coucou de l'Âme


De même qu'on ne rencontre des merles blancs
que sur le mont Cyllène d'Arcadie
et des ibis noirs
ailleurs qu'à Péluse,
sur le delta du Nil,
de même on ne peut trouver ta beauté
ailleurs que dans les hymnes
où je te célèbre,
ô ma Bien-Aimée
qui es le plus harmonieux
et le plus ardent des aigles noirs!


Oui, tu es cet oiseau bleu de Nisyros
qui vit dans les chauds rochers
de mon cerveau!


Et tu chantes dans mes rêves
comme la grive qu'on appelle litorne,
c'est-à-dire d'une voix aiguë de soprano,
mais qui chanterait
pendant des heures entières,
ainsi qu'un étourneau!


Certes, tu te vantes
de posséder la large croupe
des aigles de mer,
mais en réalité
tu es plus insaisissable
qu'un aigle fauve!


Mais, loin d'être féroce
comme un oiseau de proie,
tu es aussi craintive qu'un coucou
que même de petits oiseaux
mettent en fuite
et aussi incapable d'élever tes poussins
que cet oiseau si pacifique
et si doux dans sa solitude
que personne n'envie
et que seul le poète loue,
car il la compare
à son propre isolement!


Ô coucou de mon âme,
gazouille sur la plus haute branche
de ton grand ormeau,
oui, chante des airs plaintifs
afin que, fort de ta native mélancolie,
je puisse à mon tour
entonner de ma voix de diacre
le cantique de ta bonté
et l'antienne de ta générosité!


Le Chrétiens te nomment Marie,
les Hébreux Myriam
et les Musulmans Mariam,
mais tu es pour tous
ce rosier qui embaume
sur la croix de Jésus!


Et ta solitude évoque moins
la brebis égarée
que cette alouette huppée
qui s'enorgueillit d'être,
quoique solitaire,
la plus belle des alouettes
de ce monde!


LE COUCOU DE L'AME

RECUEIL INEDIT. DU 24 AU 31 MARS 2007